Pragmatisme et mondes en train de se faire. Séance d’ouverture du séminaire, menée par Josep Rafanell i Orra et Thierry Drumm. Jeudi 27 octobre 2016, de 19h à 22h, Laboratoires d’Aubervilliers, Aubervilliers.
Les dispositifs étouffant les pratiques collectives en les référant à une « réalité telle qu’elle est », autrement dit en les soumettant à une « réalité » qui « devrait être », semblent aujourd’hui susceptibles d’entonner aussi bien l’air de l’acceptation et du renoncement que de celui de « possibles » présentés comme impératifs (comme le signalent D. Debaise et I. Stengers), la principale condition étant de jouer le jeu de la reproduction du même – même monde, même nature, même existence. On pourrait, en s’inspirant du philosophe William James, nommer cette reproduction une fabrication d’univers. Résister à ces fabrications d’univers et donner consistance à d’autres possibles, cela exige, dans une perspective de part en part pragmatique, de relayer, d’intensifier et de cultiver des capacités de sentir, agir, penser, dans ces situations de destructions multiples des possibilités, humaines et plus-qu’humaines, de « vivre et mourir bien » (D. Haraway).
C’est cette exigence que s’efforcent particulièrement de nourrir certaines propositions pragmatistes évoquant l’importance vitale des expérimentations et apprentissages communs qui se font et se poursuivent dans les « zones formatives » où éclatent des promesses inattendues de résurgence (A. Tsing).
Peut-être que nous sommes là dans l’émergence d’une hypothèse politique qui pourrait prendre de la consistance dans les temps à venir, celle des expériences communales pour dés-administrer le monde « total ». On pourrait dire aussi : des manières « d’étonner la catastrophe ». Et nous sommes alors invités à prendre soin des passages entre des mondes.